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Surveillance et sousveillance: Janus de la sécurité
L’acuité du débat actuel concernant l’insécurité, l’accélération de la globalisation et l’émergence de nouveaux concepts du risque a généré une série d’interrogations et un contexte d’incertitudes quant aux politiques actuelles et aux actions mises en œuvre afin de contrecarrer l’insécurité et la délinquance. Renforcée par un développement considérable du marché de la sécurité et valorisée par des politiques d’État et des discours incitatifs, la surveillance s’est imposée comme un moyen incontournable de lutte contre les dangers et les risques urbains. Le Liban est entré, à son tour, dans cette course à la «technologisation», non parce-qu’elle a fait preuve de miracles en matière de sécurité, mais plutôt par manque d’autres moyens de sécurité efficaces.
La vidéosurveillance s’est considérablement développée depuis les années 1960. L’Europe et les États-Unis se sont dès lors engagés dans cette politique de prévention et de dissuasion du crime. Pour étudier la fiabilité de ce système et son impact sur la société, commençons d’abord par le concept de vidéosurveillance pour arriver ensuite à la surveillance contemporaine à l’époque du numérique. Mais, pourrions-nous conclure à partir de cette recherche si la caméra est un «traitement universel» pour l’insécurité?
Qu’est ce que la surveillance?
Le dictionnaire des vocables militaires et paramilitaires du ministère américain de la Défense définit en 2005 la surveillance comme étant «l’observation systématique aérospatiale, de surfaces ou de sous-surfaces, de zones, de personnes ou de choses par des moyens visuels, auditifs, électroniques, photographiques ou autres»[1]. Selon Eric Sadin, la surveillance consisterait à «circonscrire les individus repartis sur un territoire et à fixer les limites de leurs actions»[2].
Pour nous autres géographes, l’intérêt de la surveillance réside dans son implication avec tout ce qui touche à l’espace puisque le fait de contrôler un espace donné passe impérativement par la surveillance. En effet, c’est par le biais de cette surveillance que l’État, censé être consensuel, démocratique et respectueux de l’intérêt du citoyen, assure la protection des intérêts nationaux, notamment la sécurité et les enquêtes sur les crimes.
Le concept de surveillance est donc indissociable «de la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogues et le crime organisé»[3].Utilisée à des fins de contrôle, la surveillance s’appliquerait à des domaines multiples: le maintien de l’ordre et le contrôle de la sécurité urbaine, le contrôle des opérations bancaires et du domaine financier (détection des fraudes et du gaspillage), le contrôle de la santé publique (surveillance de la maladie par le biais de la collection systématique et l’analyse continue de données sur une maladie infectieuse dans le but de prendre des mesures pour contrôler et empêcher l’expansion de cette maladie).
Nous nous pencherons, dans notre présente étude, sur la surveillance liée à la sécurité urbaine. Dans les paragraphes suivants, nous essayerons de définir et d’analyser la surveillance liée à la sécurité urbaine et nous diviserons le travail en deux parties. Dans un premier temps, nous expliquerons en détail les méthodes de surveillance classiques et connues (basées principalement sur la vidéosurveillance).
Dans un deuxième temps, nous préciserons, conformément aux évolutions technologiques qui les caractérisent, les nouvelles modalités de la surveillance contemporaine.
La vidéosurveillance
Concernant les méthodes de surveillance liées à la sécurité urbaine, nous insisterons, dans les paragraphes suivants, sur la définition et l’analyse de la vidéosurveillance puisque cet outil est devenu «une réalité inévitable de la vie»[4] pour des milliers de citoyens à travers le monde. Le professeur de géographie humaine à l’université de Durham (UK) et l’un des spécialistes mondiaux du phénomène de cybercités Steve Graham considère que la vidéosurveillance est devenue le cinquième service public de la vie moderne après l’eau, le gaz, l’électricité et les télécommunications[5].
L’ancienne ministre française de la Défense Michèle Alliot-Marie considère que «la vidéosurveillance est une nécessité face au terrorisme et un atout contre l’insécurité»[6]. La technologie de la vidéosurveillance s’est donc progressivement imposée comme un moyen inéritable pour assurer la sécurité dans les villes (rues et places publiques). Ainsi, en dizaine d’années, les caméras de surveillance qui étaient principalement utilisées dans des endroits privés (banques, résidences privées, centres commerciaux) le sont aujourd’hui aussi dans nombre de lieux publics ou à usage public. Et c’est ainsi qu’un grand nombre de maires «…en font un élément central dans leur stratégie municipale de lutte contre l’insécurité»[7]. Quant aux résultats et aux taux de réussite, nous en ferons le bilan dans les paragraphes suivants.
Le système de vidéosurveillance se démarque des autres outils de surveillance par:
La facilité de son utilisation
Les progrès technologiques et «le passage de l’analogique au numérique»[8] ont contribué en fait à faciliter l’utilisation de cette vidéosurveillance et, par conséquent, ont contribué à son essor et à son succès auprès des «élites politiques, des entreprises et des particuliers»[9].
La multiplication des finalités assignées à l’outil
Il est évident actuellement que cet outil est d’un usage qui n’est plus uniquement réservé à des fins sécuritaires mais aussi à «des fins de gestion urbaine»[10]. Pour l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme, la police «…ne serait pas en mesure de lutter contre les crimes et les infractions sans de tels moyens: les caméras doivent déceler ce que les policiers ne peuvent voir, même si les angles de vue sont réduits»[11]. D’un autre côté, «sans le talent des policiers sur le terrain, l’efficacité des caméras reste vaine»[12]. L’efficacité de la vidéosurveillance serait donc liée à l’étroite interaction entre la composante humaine qui la gère et la composante «high-tech» propre à cette technique.
Sur un autre plan, l’analyse de l’efficacité dissuasive ou répressive des dispositifs de vidéosurveillance, nous amène à croire que leurs effets, pourraient éventuellement modifier la sécurité d’un espace public donné, sans pour autant avoir une incidence sur ce que le terme anglais de «safety» (sécurité ou sûreté de ce même espace pourrait signifier).
Dès lors quelle serait la capacité de la vidéosurveillance à assurer la protection d’un espace public? Quels seraient ses impacts sur ces mêmes espaces?
Le recours au contrôle par le biais de la vidéosurveillance aurait ainsi des retombées majeures au niveau de:
- l’espace vidéo surveillé
- le sentiment d’insécurité chez les individus.
Au niveau de l’espace vidéo-surveillé
Le contrôle de l’espace public par le moyen de la vidéosurveillance aurait alors deux impacts majeurs:
- Un impact positif qui serait «la diminution du taux de délinquance et de criminalité sur l’espace défini»[13].
- Un impact négatif puisque la vidéosurveillance induirait un déplacement de la délinquance du micro-territoire surveillé vers des zones limitrophes: «le déplacement des phénomènes de délinquance est le talon d’Achille des mesures situationnelles»[14].
Au niveau du sentiment d’insécurité
Sur un autre plan, le recours à la vidéosurveillance aurait un impact qui serait la diminution du sentiment d’insécurité chez les personnes (qui seraient rassurées par l’installation de l’outil). Comme le montrent régulièrement les sondages, la vidéosurveillance est largement soutenue par les principales parties politiques ainsi que par l’opinion publique. D’après un sondage réalisé par la société «IPSOS» en mars 2008 en France, 71% des personnes interrogées se disent favorables à l’utilisation de la vidéosurveillance dans les espaces publics.
Examinons de plus près ces impacts et analysons chacun d’entre eux sur l’espace.
Impacts sur l’espace vidéo-surveillé
Diminution de l’insécurité sur un espace donné
Selon un rapport de l’inspection générale de l’administration en France[15], les agressions progressent deux fois moins vite dans les communes équipées de patrouilles visuelles.
Pour la directrice de la sécurité et de la protection de Nice, l’ex-RG, l’ex-PAF et proche de l’UMP Sylviane Casanova, la vidéosurveillance permet de diminuer le nombre d’agressions et l’insécurité. Son effet devrait être «un effet dissuasif»[16].
Pour Michèle Alliot-Marie: «L’efficacité de la vidéosurveillance pour améliorer de façon significative la sécurité quotidienne n’est plus à démontrer. Des expériences provenant de l’étranger l’ont largement prouvée, notamment au Royaume-Uni avec l’élucidation de meurtres d’enfants et de crimes terroristes. Des expériences locales en France le montrent quotidiennement»[17].
L’étude faite par Brown[18] rejoint ce point de vue puisque selon son enquête, la vidéosurveillance jouerait un rôle dissuasif permettant de diminuer la délinquance.
Dans son livre controversé «Terrorist Hunter», l’ancien commissaire-adjoint de la Police Métropolitaine de Londres, Andy Hayman, considère que la vidéosurveillance «s’avère être efficace pour confondre les délinquants et les terroristes»[19]. D’ailleurs, la prévention du crime «serait la motivation ou l’argument avancé par les municipalités pour justifier le recours à l’installation des caméras de vidéosurveillance»[20]. Pourrait-on en déduire que la cible de cette technique serait la prévention plutôt que la répression après coup de la violence?
Cependant, les résultats des études des criminologues britanniques (étude de Brown mise à part), australiens, suisses et canadiens s’accordent à croire que l’efficacité de la vidéosurveillance demeure aléatoire.
Pour Owen Bowcott, (The Guardian, 6 mai 2008), l’essor de la vidéosurveillance n’a pas réussi à enrayer la criminalité. De son coté, Sébastien Roche qui parle également de la vidéosurveillance, considère qu’«on développe un système sans preuve de son efficacité».
Pour lui, la vidéosurveillance est «susceptible de faire baisser le nombre d’incivilités», mais ses résultats seraient «controversés comme outil de dissuasion contre la délinquance»[21]. En 2008, le responsable du bureau des images, identification et détection visuelles (VIIDO) de la Police Métropolitaine de Londres (Scotland Yard) Mick Nevill, va jusqu’à qualifier le système de vidéosurveillance de fiasco complet[22]. En fait, les caméras ne découragent pas les délinquants dans la mesure où le risque de se faire identifier et interpeller est jugé faible. Jean-Marc Manach, journaliste français spécialisé dans les questions liées à l’impact des technologies de l’information et de la communication sur la société et celles liées à la protection de la vie privée écrivait dans son blog en 2009: «la surveillance, ça sert à acheter des voix: cela fait des années maintenant que je m’intéresse à la vidéosurveillance, et j’en suis arrivé à la conclusion qu’en terme d’efficacité, la vidéosurveillance sert moins à identifier ou interpeller les criminels et les délinquants qu’à faciliter l’élection (ou la réélection) de celui ou celle qui a promu l’installation de caméras»[23].
L’analyse des dessous des déclarations, à priori contradictoires, nous mène à croire que l’efficacité peu évidente et difficilement démontrable de la vidéosurveillance varie en fonction des caractéristiques de l’espace surveillé et du type de délits. Dans les milieux fermés (parkings, hôpitaux, écoles), la vidéosurveillance offre une bonne protection puisque la chance d’identifier et d’arrêter les malfaiteurs est plus grande. En revanche, dans les espaces étendus ou complexes, la vidéosurveillance semble avoir un impact faible. De surcroît, concernant les milieux ouverts, «aucune étude ne prouve que la vidéosurveillance ait un effet bénéfique»[24].
Les limites d’efficacité de la vidéosurveillance seraient, par ailleurs, définies par:
a- «La nature impulsive des comportements des délinquants (notamment les délits commis sous les effets de l’alcool ou de la drogue)»[25].
b- l’intégration du système de vidéosurveillance «dans les procédés des pickpockets»[26].
Cependant, les conclusions des études évaluatives de «Gilles and Spriggs, de Boudreau et Tremblay»[27], (préjudiciables quant à l’efficacité de la vidéosurveillance), convergent pour braquer la lumière sur une plus grande efficacité sur les atteintes aux biens que sur les atteintes aux personnes, ainsi qu’une nette amélioration de l’efficacité lorsque la vidéosurveillance est accompagnée d’autres mesures de prévention contre la délinquance. C’est donc tout un système de mesures préventives, une stratégie globale de sécurité (comprenant entre autres outils la vidéosurveillance) qui contribuerait à la diminution du taux de délinquance. La vidéosurveillance «n’est pas une solution en soi»[28], «fût-elle présentée comme tout-en-un»[29]. Toutefois, le revers de la médaille serait inquiétant sur le plan des libertés et de la démocratie. Le vice-Premier ministre britannique, Nick Clegg, accuse le système de vidéosurveillance «de culture d’intrusion dans la vie privée des citoyens»[30]. Le fait de concilier sécurité et liberté devient problématique puisque dans les sociétés modernes et pour les politiques contemporaines «la liberté est facilement relativisée face aux problèmes d’insécurité. Les droits à l’anonymat et à la liberté seraient-ils devenus des «droits faibles?»[31].
Déplacement de la précarité de la zone vidéo surveillée vers des territoires limitrophes
Ce transfert de la précarité (délinquance) est également appelé «effet plumeau»[32]
D’après l’évaluation faite par le CETEL, (université de Genève de Fribourg en octobre 2006), «la vidéosurveillance tend à moins discipliner les comportements des individus qu’à discipliner le territoire, à rendre certains quartiers ou secteurs plus sûrs»[33].
L’étude de Gill et Spriggs aboutit aux mêmes résultats contrairement aux résultats des études de Ben Brown où l’effet plumeau n’est pas observé. Là encore, l’impact de la vidéosurveillance sur l’espace n’est pas systématique et pas plus qu’il n’est démontrable. Il varie en fonction des délits observés, comme pour la vente de drogue par exemple. En effet, l’étude de Boudreau et Tremblay, démontre que le déplacement des délits n’est pas systématique. Cette théorie est illustrée par les résultats des études menées au Canada en 2005 selon lesquelles «l’effet plumeau» se vérifierait pour la vente de drogues.
Impact sur le sentiment d’insécurité chez les personnes
D’après Sylviane Casanova, la vidéosurveillance fait diminuer le sentiment d’insécurité chez la population. Pour l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme (IAU)[34], la vidéosurveillance aurait «un usage symbolique: rassurer les populations en montrant une preuve visible de la prise en charge de la sécurité par les autorités concernées».
Effectivement, les résultats des enquêtes menées en 2009 par l’IAU (Institut d’Aménagement et d’Urbanisme) en Île-de France et portant sur le sentiment d’insécurité ainsi que sur le point de vue, des Franciliens, sur la vidéosurveillance montrent que pour six enquêtes sur 10, l’installation de caméras de surveillance dans les lieux publics permet de lutter contre la délinquance. Plus les personnes sont âgées, plus elles y sont favorables. Cependant 41.8% des personnes qui se disent rassurées par la vidéosurveillance reconnaissent tout de même être sujettes à la peur. Cet outil n’aurait-il qu’un impact limité sur le sentiment d’insécurité? C’est ce qui ressort des enquêtes et des évaluations faites par Ben Brown & M. Gills et A.Spriggs[35].
L’analyse des résultats des différentes études nous amène à croire que l’efficacité de la vidéosurveillance ainsi que son impact sur l’espace et sur le sentiment d’insécurité sont peu évidents et déterminés par des variables différentes. L’enjeu de la vidéosurveillance se situerait plutôt «du côté de son utilisation par les services de police comme outil de police judiciaire[36]». La vidéosurveillance constituerait une preuve à charge en cas d’enquête judiciaire et favoriserait la rapidité de l’enquête. Elle permettrait également une rationalisation des forces de police en favorisant un déploiement approprié et en limitant les déplacements inutiles de la police. D’où la contradiction que les caméras de surveillance augmenteraient le sentiment d’insécurité chez les citoyens, puisqu’elles induisent les conséquences suivantes: d’une part adoptant le système pour réduire le nombre de patrouilles et les ressources requises, la police ne bougerait pas de ses postes et serait invisible pour les citoyens. D’autre part, l’efficacité de la vidéosurveillance est tributaire de la composante humaine du système. Seule la police peut juger s’il est nécessaire de se déplacer; c’est donc dans l’œil des chargés en poste que se joue son «rendement». D’ailleurs la British Security Industry Association, accuse les forces de police d’avoir empêché la maximisation du potentiel de ce système[37].
Sur un autre plan, les systèmes de vidéosurveillance connaissent, selon les villes, des évolutions d’ampleur et de nature différentes. Ces différences tiennent aussi bien «aux contextes nationaux et locaux qu’à des considérations politiques, économiques, culturelles et sociales»[38]. Pour illustrer ceci, établissons une comparaison rapide entre les deux villes de Beyrouth et de Nice. L’établissement de cette comparaison souligne à quel point les contextes et logiques qui conduisent les États à utiliser la vidéosurveillance «varient en fonction des enjeux politiques et économiques qui les structurent»[39].
La ville de Nice compte déjà «282 caméras; dans quelques mois le nombre de caméra augmentera gusqu’à atteindre les 624 soit une caméra pour 600 habitants contre une pour 2000 à Paris[40]». Ainsi Nice est devenu la capitale la plus surveillée de France.
Le grand Beyrouth, en effet, compte 1.300.000 habitants et une région urbaine qui s’étend sur 217 km2 [41]. Pour sa part, Nice, capitale de la Riviera française, compte 955.000 habitants et une région urbaine de 721 km2 [42].
À Beyrouth, les caméras de vidéosurveillance installées par le Ministère libanais de l’Intérieur sur les espaces publics sont absentes. En cas d’enquête, les forces de la Sécurité Intérieure ont recours aux enregistrements effectués par les caméras de vidéosurveillance privées installées aux alentours des banques, des hôtels, des hôpitaux, des écoles et des ambassades ainsi que par les caméras de vidéosurveillance du centre-ville installées et gérées par la société SOLIDERE. Les caméras installées par le Ministère de l’Intérieur aux portes d’accès de la ville sont qualifiées de vétuste et de médiocre[43]. La finalité de leur usage se limite à la gestion du trafic routier et au contrôle des éxcès de vitesse.
L’absence des caméras de vidéosurveillance sur les espaces publics beyrouthins est due à deux raisons majeures: l’une économique et l’autre politique.
1- La raison économique serait le budget élevé requis pour l’installation des caméras. Le premier adjoint au maire chargé de la sécurité de la ville de Nice Benoit Candel explique qu’on avait provisionné le projet du centre de vidéosurveillance de Nice à 15 millions d’euros[44].
2- La raison politique montre les dessous politiques de l’inexistence des caméras. Un article paru dans le quotidien libanais Al-Balad en mai 2007 révèle qu’en prévision d’attentats potentiels contre Beyrouth, le Conseil des ministres avait envisagé l’installation de caméras de surveillance reliées aux satellites, mais ce projet n’a pas pu être réalisé et reste un sujet de discussion entre les différents pôles politiques vu son ambigüité et les conséquences qu’il implique en matière d’ingérence interne et externe.
À la question «vous sentez-vous sécurisés par l’installation de caméras de surveillance?», 57% des personnes interrogées ont répondu par la négative, 30% ont répondu par l’affirmative et 13% ont répondu que ceci leur est insignifiant. Investigant encore davantage, nous avons recueillis les constatations que les personnes ayant répondu défavorables ou indifférentes avancèrent des causes que nous avons regroupé en cinq points:
1- Raison politique: les citoyens n’ont pas ou très peu confiance en l’autonomie du système juridique. Ils suspectent les lobbys politico-confessionnelles d’ingérence dans le juridique et de manipulation des magistrats.
2- Incompétence des forces de l’ordre qui seraient mal équipées et qui obéiraient à des pôles politico-confessionnels opposés.
3- La surveillance humaine: les lacunes en dispositifs sécuritaires et en équipements sont largement compensées par les avantages qu’offre naturellement la surveillance humaine induite par l’association de deux facteurs, la densité des habitations et la mentalité clanique des beyrouthins. La ville de Beyrouth se démarque, sur le plan socioculturel, par de fortes conventions héritées de la société rurale. En effet en dépit de son cachet moderne, Beyrouth n’offre pas «la promesse d’anonymat et la libération des conventions et contraintes familiales[45]» puisqu’elle conserve un cachet clanique hérité de son histoire. Elle s’imprégna des normes de la société rurale du mont Liban[46]. «Elle ne s’est pas forgée ou n’a pas été autorisée à se forger une identité propre[47]».
4- Manque d’efficacité du système de vidéosurveillance: même dans les pays occidentaux, ce système n’a pas démontré une baisse des actes criminels comme cité plus haut.
5- Pour les beyrouthins, le problème de la délinquance n’occupe pas la première place sur l’échelle des problèmes sécuritaires anxiogènes. Ils sont largement devancés par les problèmes économiques et politiques mettant en danger l’avenir du pays.
Par conséquence, les sondages portant sur la diminution du sentiment d’insécurité chez les citoyens beyrouthins, suite à l’installation des caméras, démontrent que ce dispositif n’a aucune incidence sur la variation de ce sentiment, vu le degré d’impunité prévalant dans ce petit pays. Le facteur vidéosurveillance ne constitue pas un paramètre déterminant dans la perception de la sécurité chez les citoyens libanais en général et les beyrouthins en particulier et demeure, de ce fait, de valeur minime, avec le manque de suivi dans le système judiciaire et l’impossibilité souvent de pouvoir arrêter les criminels captés sur caméra. Face à cette réalité, la question de l’utilité de l’installation de ces outils coûteux se présente comme de facto, mais il parait, que les Libanais, devant l’embarras du choix (insuffisance de patrouilles armées, intervention non-garantie des forces de l’ordre au moment propice, impunité, etc.), n’ont qu’à se débrouiller eux-mêmes, et à agir d’une façon ou d’une autre, même si les résultats ne sont pas toujours garantis. C’est là une forme d’autoprotection incontournable face au manque de confiance de tout ce qui émane de l’État.
Sur un autre plan, la technologie continue son essor numérique donnant aux dispositifs de sécurité une efficacité et une omniprésence encore jamais atteintes. C’est alors qu’on vit, depuis quelques années, l’émergence d’une nouvelle forme de surveillance qui s’amplifia suite aux attentats du 11 septembre.
Tout comme pour le concept de terrorisme, il yeut, pour le concept de surveillance après le 11 septembre dans la mesure où le monde de la surveillance connut une intensification sans précédent des modalités de contrôle suite aux attentats de New-York. Intensifications catalysées par la montée de la peur face au terrorisme fondamentalisme devenu maintenant transnational.
En effet, suite aux attaques de septembre 2011 (perpétrées par Al Qaida) les autorités sécuritaires dans le monde adoptèrent de plus larges mesures de contrôle dans le but d’étouffer dans l’œuf toute velléité d’action terroriste et dans le but de resserrer l’étau autour d’éventuels mouvements terroristes. Le renforcement des formes administratives et policières de contrôle, furent telles que l’on parla d’un nouveau concept de la surveillance: la surveillance contemporaine ou la sousveillance. Les modalités nouvelles qui forment ce dispositif global, questionnent le paradigme connu de la surveillance. Qu’est-ce-que la surveillance contemporaine? Qu’est-ce-qui la caractérise? Quel serait le paradigme de cette nouvelle forme de surveillance?
La souveillance ou surveillance contemporaine
La sousveillance ou le contrôle contemporain se démarque de la surveillance classique par son aspect tactique, par la cible du contrôle, par l’objet surveillé et par les échelles de contrôle.
1- le niveau tactique: la sousveillance se différencie au niveau tactique par:
a- La multiplicité des moyens de contrôle puisés dans les technologies numériques contemporaines.
b- La permanence et l’invisibilité.
Alors que dans son sens classique et connu, la surveillance se faisait par le biais de la vidéosurveillance et des agents des forces de l’ordre (et des détectives privés), la surveillance contemporaine ou sousveillance se caractérise par une multiplicité des moyens de contrôle: «la surveillance par ordinateur, l’interconnexion généralisée, la surveillance par téléphones mobiles, la biométrie, le «data mining» et le «profiling», l’imagerie satellite, les puces RFID, la géo localisation, les bases de données et l’avenir nano technologique»[48].
Ces nouvelles méthodes de surveillance contemporaine se démarquent de la surveillance classique par leur permanence et leur côté invisible, contrairement aux modalités classiques de vidéosurveillance. Au niveau tactique, «nous vivons une période historique inédite, marquée par le développement ininterrompu de nos gestes par des protocoles de suivi et de récoltes d’informations à l’égard d’un nombre de plus en plus élargi d’actions quotidiennes»[49].
La notion de sousveillance induirait un processus qui serait, selon D. Quessada, le suivant: «une collecte ininterrompue d’informations, émises par les individus surveillés qui dessinent eux-mêmes la traçabilité de leurs actes»[50]; à condition que les «joueurs» laissent, volontairement ou involontairement, des traces (empreintes, ADN…). L’on pourrait associer ce processus à la notion de «tracking» ou de «suivi»[51]. La notion de «tracking» aurait donc suppléé à la notion de surveillance classique.
On dirait «qu’il n’existe pas un projet unifié de surveillance dans la sousveillance globale, mais un foisonnement de stratégies et un développement de techniques très diversifiées dont la rencontre ou le croisement génèrent une efficacité pluristratifiée»[52]. Ce système représenterait «la réponse la plus appropriée aux problèmes de menaces terroristes»[53]; cependant nous ne disposons d’aucune étude évaluative permettant de mesurer l’impact de ces méthodes de surveillance sur les variations du nombre de crimes de droit commun.
2- L’objet surveillé: Alors que la surveillance classique s’intéresse aux délits commis sur un espace défini, la sousveillance s’intéresse aux délits potentiels qui pourraient être commis sur ce même espace: le contrôle par sousveillance porte donc sur «quelque chose d’abstrait»[54].
L’objet surveillé pourrait être immatériel sans que l’adjectif ne constitue une entrave à la procédure de contrôle. Dans le registre de la sousveillance, «n’est plus surveillable seulement ce qui est visible. Le visible devient une partie du surveillable»[55]. Par conséquent, dans le concept de la sousveillance, l’objet surveillé se caractérise par son aspect invisible.
3- La cible de contrôle: Alors que l’enjeu de la surveillance classique est «l’amélioration des prestations et des performances des services de détection des crimes, fraudes, gaspillages»[56], le but de la surveillance contemporaine, serait en plus, «l’identification de structures de comportements menant à de telles activités»[57]. L’enjeu de la sousveillance serait donc de «définir des profils plus individualisés en vue de prévenir a priori, actes terroristes ou simplement illégaux et non plus punir, à posteriori des coupables»[58]. La sousveillance donc serait une «évaluation anticipée des comportements humains»[59].
En effet, autant la surveillance tend à maîtriser les dangers présents sur un espace défini, la sousveillance tend à prévenir les risques potentiels sur l’espace donné.
Pour Antoinette Rouvroy et Thomas Bern, la cible du contrôle contemporain ne consiste plus uniquement à dompter l’actuel mais «viserait à structurer le possible, à éradiquer le virtuel»[60].
On peut donc être arrêté sans avoir rien commis de délictuel et c’est arrivé. Nick Clegg, déclara le 19 mai 2010 qu’il était «inacceptable que des personnes qui respectent la loi soient traitées comme si elles avaient quelque chose à cacher»[61]. D’où la question: qui surveille les surveillants? Qu’en est-il de la démocratie?
L’ancien ministre fédéral allemand de l’Intérieur Otto Schily, accuse «la surveillance extensive de violations disproportionnées des droits fondamentaux»[62].
4- l’échelle de contrôle: Alors que dans le concept de surveillance classique les opérations de contrôle se faisaient à hauteur nationale, dans le concept de la sousveillance, «le niveau d’opérations à hauteur nationale est devenu indissociable d’une coopération internationale (emblématique de la lutte contre le terrorisme, l’identification des réseaux mafieux de trafic de drogues, de prostitutions, de blanchiement d’argent)»[63]. La liste devient progressivement plus longue, y compris les «délits d’opinion», potentiellement classés «dangereux» au gré des humeurs des États.
Elaborées dans le but de diminuer les risques d’insécurité urbaine et d’améliorer la qualité de vie des citoyens, la surveillance contemporaine est au cœur des débats passionnées, laissant émerger des inquiétudes et des craintes quant aux dérives possibles de cette surveillance accrue. En effet, du fait des évolutions technologiques qui la caractérisent, la surveillance contemporaine est de nature «à ouvrir de façon exponentielle le champs des possibles»[64].
Quelles seraient les conséquences de la technologisation fulgurante de la sécurité au double plan politique et social?
Pourquoi est-il devenu difficile «de faire admettre le principe de la surveillance de tout un chacun et ce, pour la sécurité de tous»[65]?
Retombées de la surveillance au plan social
De par le contrôle accru qu’elle exercerait, la surveillance contemporaine serait-elle de nature à altérer l’expression des libertés individuelles sur l’espace surveillé? Là encore les avis divergent: les discours de certains responsables de police et de certains politiciens «prêts à bondir sur le tremplin de l’insécurité»[66], sont assez inquiétants et loin de recouper les avis des experts en criminologie et des enquêteurs.
Pour B. Kandel, (ex-colonel de gendarmerie, premier adjoint de la ville de Nice, UMP), «il ne faut pas renverser les choses. Ce qui est liberticide c’est la délinquance»[67]. Toujours selon Kandel, les dispositifs de sécurité n’ont jamais commis un quelconque acte délictuel: Je n’ai jamais vu une caméra voler un sac à main ou agresser quelqu’un. Cependant, les agressions physiques commises par les délinquants sont-elles les seules formes d’agression commises à l’encontre des individus sur un espace donné? Toujours pour Kandel, les voyous ne sont pas les seuls à avoir le droit de travailler avec des outils ultramodernes. Nous ne sommes pas là pour espionner les gens, alors que le maire de Nice, Christian Estrosi, considère que «la peur doit changer de camp». À Nice l’on parle de caméras de «vidéo protectionliées au centre de vidéosurveillance»[68]. Ce glissement sémantique serait-il une subtilité dans le but de mettre l’accent sur l’aspect préventif et protecteur de l’outil caméra plutôt que sur son aspect intrusif?
La cible de la surveillance accrue serait une réduction maximale voire un anéantissement des facteurs de risques; cependant le risque zéro existe-t-il? Pour Ariel Kyrou, l’horizon du concept de sousveillance serait «la précognition ou l’abolition de toute incertitude». Kyrou parle de «sentiment illusoire de sécurité absolue…l’illusion d’une certitude absolue (qui serait) l’opposé de la recherche du savoir et qui nous transformerait à notre issu, en tant qu’être humains, en agents de la peur»[69].
Dans le même esprit, Germaine Greer affirme que le seul endroit où un individu se sentirait réellement en sécurité serait dans une prison à sécurité maximale, sauf au cas d’une menace imminente de libération[70].
Retombées dela surveillance au plan politique
Evoquant les implications politiques de l’existence des techniques de sousveillance, Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, ainsi que Dominique Quessada dans leur article «La surveillance globale, un nouveau mode de gouvernementalité» parlent «d’une révolution de pouvoir»[71]. Pour Eric Sadin, «ce sont les implications politiques de l’existence de techniques de sousveillance qui sont les plus immaîtrisables»[72].
Pour Michel Foucault, dont la pensée est indissociable des questions relatives à la surveillance, à la discipline et au contrôle,«la problématique de la surveillance se distribue, dans la modernité entre les rationalités politiques»[73].
En effet, l’un des écueils du contrôle contemporain réside dans l’ubiquité de ses dispositifs techniques. Ainsi, «un même dispositif peut voir son sens modifié s’intégrer à des rationalités politiques différentes; il se trouve, par conséquent, défini par la variété de ses usages davantage que par ses qualités intrinsèques»[74]. Potte-Bonneville, dans son article «Surveillance, contrôle, gouvernement: l’ADN du contemporain», évoque une «mobilisation des progrès technologiques de la part des gouvernements afin d’établir de nouveaux modes de gouvernementalité»[75].
En effet, l’exemple polémique des tests génétiques (les tests ADN), souligne les travers «des modernités des technologies politiques» qui instrumentalisent ces technologies du vivant au service de buts à caractère politique. Par ailleurs, Potte-Bonneville considère que cet exemple illustre la tentative de la part «des gouvernements de faire des gouvernés les acteurs de leur propre exclusion».
Pour A. Rouvroy et T. Bernces les dispositifs technologiques se présentent comme des instruments de gouvernement. Ils se caractérisent par une spécificité qui serait la capacité d’interprétation des données qu’ils enregistrent en fonction des critères de normalité ou d’anormalité. Ainsi, en favorisant l’émergence «de nouveaux schémas de pensée qui échappent à des principes essentielscomme la casualité, la succession temporelle et la responsabilité juridique, la sousveillance remet en question les appuis classiques du juridisme»[76]. C’est dans ce contexte que les «implications politiques de l’existence de la sousveillance sont les plus immaîtrisables»[77].
Autre illustration des dérives au niveau du contrôle de l’information serait l’exemple des agents britanniques, employés de la GCHQ, le «Government communications headquarters» (le service de renseignements électroniques du gouvernement britannique). En effet, en 1992, ces agents britanniques ont confié au London Observer «qu’ils ne pouvaient plus passer outre ce qu’ils considéraient comme des fautes professionnelles flagrantes et des négligences commises au sein de l’établissement où ils travaillaient»[78]. Ils ont affirmé qu’Amnesty International et Christian Aid «étaient ciblés d’une manière routinière»[79]. La cible du contrôle n’est plus la sécurité mais la manipulation des dispositifs de surveillance et de contrôle afin d’observer les critiques.
Pour clôturer les paragraphes concernant la surveillance, il convient d’en souligner l’essentiel, compte tenu des dérives possibles des méthodes de surveillance contemporaine, et de fixer des limites dans le but d’assurer un contrôle démocratique des informations recueillies. Dans cette optique d’ailleurs, une charte pour une utilisation démocratique de la vidéosurveillance fut élaborée et signée en mai 2010 par 10 villes européennes[80]. L’établissement d’un encadrement juridique réglementant l’usage des techniques numériques modernes serait donc nécessaire afin de contourner les écueils de leur application au domaine de la surveillance et du contrôle.
Finalement, la vidéosurveillance constitue un support de sécurité, mais déclanche également un débat en matière d’efficacité et de vie privée. Des associations vont même jusqu’à lutter contre ce phénomène, comme l’organisation «Souriez vous êtes filmés».
Au sein de lieux centralisés, à quoi servent-les caméras? Ne sont-elles pas une violation de la vie privée? La vidéosurveillance est-elle garante de la liberté? Rien n’est moins sûr. Mais ce qui est sûr c’est que l’implantation de ces caméras sert plus au contrôle social qu’à avoir un impact réel sur le crime. Finalement, la vidéosurveillance dans le monde a sans doute eu une influance sur le comportement des criminels dans la mesure où ils agissent désormais avec plus de prudence. Au Liban, si les citoyens tendent parfois à avoir un avis favorable pour la vidéosurveillance, et donc à sacrifier leur liberté et leur droit, c’est parce qu’ils voient que les autres mesures préventives et répressives employées dans ce pays sont bien ballotées, voire même manquées. Ainsi, concluons sur un constat que pour les citoyens inquiets, il parait que la vidéosurveillance rassure souvent mais ne protège nullement.
[1]- Defense Technical Information Center, (Ressource électronique), Disponible sur: http:/ / www.dtic.mil/ doctrine, consulté le 11-12-2010.
[2]- Eric SADIN, «Le nouveau paradigme de la surveillance. Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, 1/ 2010, no. 40, pp. 60-66, Disponible sur: www.cairn.info/ revue-multitudes-2010-1-page-60.htm, consulté le 11-12-2010.
[3]- Op. cit.
[4]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Paris, 2010, p. 14.
[5]- Op. cit, p. 74.
[6]- Op. cit.
[7]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Paris Match, (article), numéro 3173, 2010, France, p. 88.
[8]- Dominique Quessada, «De la Sousveillance à la Surveillance Globale, un nouveau mode de gouvernementalité» (En Ligne), Disponible sur: http:/ / www.cairn.info/ revue_multitudes_2010, consulté le 02-11-2010.
[9]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», op. cit, p. 88.
[10]- Ayse Ceyhan, «Identifier et surveiller: Les technologies de sécurité», Cultures et conflits, numéro 64, 2006, p. 7-9.
[11]- Vidéosurveillance et espaces publics, Institut d’Aménagement et d’urbanisme, numéro 486, Ile-de-France, août 2009, Disponible sur: http:/ / www.iau-idf, consulté le 14-05-2010.
[12]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit.
[13]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p. 88.
[14]- Op. cit.
[15]- Op. cit.
[16]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit.
[17]- «Vidéosurveillance et espaces publics», Institut d’Aménagement et d’urbanisme, Op. cit. Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p. 89.
[18]- Ben Brown, «CCTV In Town Centers: 3 Cases Studies, Detection and Prevention Series», Paper 68, Police Research Group, 1995.
[19]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, pp. 43-44.
[20]- «Vidéosurveillance et espaces publics», Institut d’Aménagement et d’urbanisme, Op. cit.
[21]- Op. cit.
[22]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 13.
[23]- Jean-Marc Manach, «La surveillance, ça sert à acheter des voix», 21 août 2009, Disponible sur: http:/ / bugbrother.blog.lemonde.fr/ 2009/ 08/ 21/ la-surveillance-ca-sert-a-acheter-des-voix/
[24]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 13.
[25]- Op. cit.
[26]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 13.
[27]- Op. cit.
[28]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 127.
[29]- Noël Le Blanc, «Sous l’œil myope des caméras», Le Monde Diplomatique, (article), septembre 2008.
[30]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, pp. 78-79.
[31]- Op. cit, p. 17.
[32]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p.89.
[33]- J. Ruegg, «Étude du Centre d’Études, de Techniques et d’Évaluation Législative (CETEL)», Université de Genève et de Fribourg, Octobre 2006.
[34]- Institut d’Aménagement et d’urbanisme, numéro 486, Ile-de-France, août 2009, Disponible sur: http:/ / www.iau-idf.fr, consulté le 02-11-2010.
[35]- Op. cit.
[36]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p.88.
[37]- Op. cit, p. 43.
[38]- Ayse CEYHAN, «Identifier et surveiller: Les technologies de sécurité», Cultures et conflits, no. 64, 2006, pp. 7-9.
[39]- Op. cit.
[40]- Op. cit.
[41]- Awad Souheil, Docteur en géographie, Cartographe, Entretien personnel.
[42]- Dictionnaire encyclopédique, Larousse, 2002.
[43]- Registres des FSI.
[44]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p.88.
[45]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 28.
[46]- Georges CORM, «Le Liban contemporain – Histoire et société», La Découverte, Paris, 2005, p. 50.
[47]- Michael DAVIE, «Beyrouth quelle capitale pour quel pays», (Colloque), «Reconstruire le Liban: espoirs et réalités», Atelier «L'aménagement de Beyrouth ou l'urbanisme en question», Le Sénat, Paris, 12 septembre 1994.
[48]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p.88.
[49]- Eric Sadin, «Le nouveau paradigme de la surveillance Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, Op. cit.
[50]- Dominique Quessada, «De la sousveillance la surveillance globale, un nouveau mode de gouvernementalité», Op. cit, p. 60.
[51]- Eric Sadin, «Le nouveau paradigme de la surveillance Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, Op. cit.
[52]- Dominique Quessada, «De la sousveillance la surveillance globale, un nouveau mode de gouvernementalité», Op. cit, p. 58.
[53]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 15.
[54]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (En Ligne), Disponible sur: http:/ / www.cairn.info/ revue, multitudes, 2010_htm, consulté le 10-12-2010.
[55]- Op. cit.
[56]- Dominique QUESSADA, «De la sousveillance la surveillance globale, un nouveau mode de gouvernementalité», Op. cit, p. 60.
[57]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (En Ligne), Op. cit.
[58]- Eric Sadin, «Le nouveau paradigme de la surveillance Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, Op. cit.
[59]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (En Ligne), Op. cit.
[60]- Op. cit.
[61]- «Citoyens, Villes et Vidéosurveillance», European Forum for Urban Security, Op. cit, p. 14.
[62]- Op. cit, p. 78.
[63]- Eric Sadin, «Le nouveau paradigme de la surveillance Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, Op. cit.
[64]- Op. cit.
[65]- Mathieu Potte-Bonneville, «Surveillance, contrôle, gouvernement: l’ADN du contemporain» (En Ligne), Disponible sur: http:/ / www.cairn.info/ revue_multitudes_2010_1.htm, consulté le 10-12-2010.
[66]- Noël Le Blanc, «Sous l’œil myope des caméras», Le monde diplomatique, Op. cit.
[67]- Flore Olive, «Sous haute surveillance», Op. cit, p. 89.
[68]- Op. cit.
[69]- Op. cit.
[70]- Dictionary of Quotes: (Ressource électronique), Disponible sur: http:/ / www.quotesdictionary.com, consulté le 10-12-2010.
[71]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (En Ligne), Op. cit.
[72]- Eric Sadin, «Le nouveau paradigme de la surveillance Cerner l’humain par l’entrelacs du marketing et de la sécurité», (En Ligne), Multitudes, Op. cit.
[73]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (En Ligne), Op. cit.
[74]- Dominique Quessada, «De la sousveillance la surveillance globale, un nouveau mode de gouvernementalité», Op. cit, p. 60.
[75]- Op. cit.
[76]- Op. cit.
[77]- Antoinette Rouvroy, Thomas Bern, «Le nouveau pouvoir statistique» (en ligne), Op. cit.
[78]- Charte pour une utilisation démocratique de la vidéosurveillance, European Forum for Urban Security, Paris, 2010.
[79]- Op. cit.
[80]- Ayse Ceyhan, «Identifier et surveiller: Les technologies de sécurité, Cultures et conflits», Op. cit, pp. 7- 9.
المراقبة: جانوس الأمن
ان المراقبة بواسطة الكاميرا غدت تشكل عاملًا متفجرًا في الأمكنة العامة، خاصة مع التطور التكنولوجي الذي يسهّل هذا النوع من المراقبة. ان اخضاع الأشخاص والأمكنة لمراقبة متواصلة – أو بكلمات أخرى مراقبة كل شيئ – أمر من شأنه أن يبعث على الاطمئنان أكثر ويساهم في الامساك بالأمن في هذا العالم المتطور. ان تقبّل المراقبة، كذلك الأمر بالنسبة للتكنولوجيا، تطوّر بشكل تدريجي. وكما الحال دائما، يتبع لبنان الموضة، غير أن هذه المرة، هناك على ما يبدو حلقة ناقصة في سلسلة الأمن في هذا البلد الصغير: العقاب. هل باستطاعتنا دائما ملاحقة المجرمين الذبن ضبطوا بواسطة الكاميرا؟ إذا كان الجواب سلبيا، فما فائدة إنفاق مبالغ ضخمة على هذه التكنولوجيا؟ ان هذا السؤال المفتوح يترك المجال واسعًا أمام نقاشات مستفيضة.
ان المراقبة بواسطة كاميرا الفيديو وهي خدمة عامة، أصبحت أمرًا واقعًا لا مفر منه لضمان أمن المدن. فالمواطنون، أجهزة الشرطة و الأمن والجيش يعتمدون بشكل كبير على هذه التكنولوجيا من أجل مواجهة المخالفات والجرائم، ولتحسين مستوى الأمن اليومي. ان هذه الأجهزة تؤمن «تواجدًا» دائمًا في الأمكنة حيث يصعب على التواجد البشري مهما كان متطورًا أو منظّمًا، أن يكون مؤمّنًا. غير أن البعض يتساءل عن مدى الفعالية الحقيقية لهكذا أجهزة في الأمكنة المفتوحة، بينما يعتبر البعض الآخر أنها تشكّل تعديًا على الحرية، على الحياة الخاصة وعلى الديمقراطية. وقد لاحظنا أن المراقبة بواسطة كاميرا الفيديو تكتفي بنقل ظرفي للمنطقة المراقبة إلى المناطق المتاخمة التي لا تخضع لعين الكاميرا. مع ذلك فإن المراقبة بواسطة الفيديو لها تأثير مطمئن، تقلل الشعور بعدم الأمان لدى المواطنين الذين يعتقدون حقًا أن كل شيئ ممسوك في مجتمعهم. غير أن النقاش حول مدى فعالية هذه التقنية ليس مغلقًا، وتنقسم وجهات النظر حول هذا الموضوع بين مؤيد ومعارض.
وقد بدأ يظهر نوع جديد من المراقبة، وهي المراقبة المعاصرة أو المراقبة المعروفة بأنها دائمة وغير مرئية. ان هذا المسار يتشارك مع فكرة «التعقب» أو «التتبّع». من شأن هذه التكنولوجبا المعاصرة أن تستبق الجرائم وأن تراقب ما هو غير مرئي من أجل تحديد الشبكات غير الشرعية بشكل مسبق والتنبؤ بالأعمال الارهابية. غير أن طبيعة هذه التكنولوجيا التي تستهدف المحتمَل، تطرح العديد من الأسئلة عن مدى دقّتها وحتى عن مدى فعاليتها، وتأثيرها على المستويين القانوني والاجتماعي. بالإضافة إلى ذلك، هل باستطاعتها التقليل من عوامل الخطر حتى الصفر؟ أم ما هي إلا عبارة عن وهم الأمن المطلق مرة أخرى؟